livre : “The Phoenix Project”

7 November 2018

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Peut-être vous souvenez-vous du livre « The Goal », le formidable bouquin de Eliyahu Goldratt, qui non seulement a révolutionné l’industrie américaine en présentant la théorie des contraintes mais a aussi révolutionné la littérature business en introduisant des concepts de management sous la forme d’un roman (ouf, fini les livres soporifiques ! Il n’y a plus que la Harvard Press qui persiste…). Hé bien ce livre veut faire pour l’IT ce que le livre de Goldratt a fait pour l’industrie 30 ans avant lui, en reprenant à son compte l’idée de l’usine et la trame de l’histoire. Avec même un clin d’oeil à l’original.


En effet, le livre prend pour pour contexte une entreprise industrielle en perdition à cause de problèmes fondamentaux dans le département IT impactant fortement le business (hum, well…coulant le business). Cela ressemble à du vécu, même si les auteurs forcent un peu le trait pour faire passer leur message : développement bâclé, opérations en mode pompier, sécurité et compliance qui en rajoutent une couche toujours dans l’urgence…Bref, je ne vous fais pas la liste : l’IT dysfonctionne complètement, entrainant l’entreprise dans son naufrage. Les auteurs introduisent alors ce qu’ils appellent les “3 ways” une philosophie nouvelle qui prône 3 valeurs:

1. penser “systèmes”la 1ère voie incite à penser en systèmes interdépendants. Ainsi, l’IT est un système lui-même intégré dans autre système plus large : l’entreprise, le business. Un département, une ressource IT en particulier est aussi un système faisant partie du système IT plus large.L’idée est favoriser la performance du système (l’ensemble, le tout) par rapport à la performance d’un silo et de briser la notion de départements cloisonnés, sans relation les uns avec les autres. Il est vrai que beaucoup de départements IT ont perdu la compréhension de leur mission initiale (être au service du business pour le favoriser et idéalement lui donner un avantage concurrentiel) pour se refermer dans leur bulle et maudire les entités externes (business, clients) qui viennent les empêcher de tapoter en rond sur leurs claviers.
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Ainsi, l’accent est mis sur le flux de valeur permis par l’IT et non sur l’IT lui-même. De cette première philosophie découlent les principes simples et fondateurs qui sont :1. une défectuosité identifiée est traitée avant d’atteindre la prochaine étape de travail (on ne refile pas ses problèmes aux petits camarades suivants…),2. une optimisation d’un processus local ne doit jamais se faire au détriment de l’ensemble,3. toujours chercher à favoriser et augmenter la fluidité du système,4. toujours chercher à acquérir une compréhension approfondie du système.


En pensant « systèmes », en considérant l’entreprise ou la business line comme un tout, nous sommes prêts pour la 2 ème étape…

2. amplifier les boucles de feedback

La 2ème voie concerne l’amélioration continue qui passe par :1. la création de boucles de feedback capables de remonter les problèmes et proposer des améliorations le plus en amont possible dans les processus,2. le raccourcissement de ces boucles pour remonter rapidement les problèmes et améliorations : on n’attend pas que le produit soit fini pour détecter les défectuosités et en faire part en amont (cf point 1.1),3. la mise en place de point de mesure pour donner le feedback en temps réel sur l’efficacité du système.
Cette amélioration continue « embarquée » dans les processus et pervasive à travers tout le système permet de mieux comprendre les besoins des clients (internes ou externes), de mieux y répondre et de préparer le terrain pour la 3ème voie…

3. favoriser une culture de l’expérimentation continue et de l’apprentissage par l’action

La 3ème voie consiste à favoriser l’expérimentation continue, la prise de risque et l’apprentissage des échecs (non, pas le jeu…). C’est le dernier étage de la fusée, après l’appréhension du système dans sa globalité et son amélioration continue rapide : l’expérimentation rapide et la prise de risque permettent d’innover rapidement, de tester des choses qui peuvent paraître incongrues et d’apprendre des succès et des échecs. C’est la culture du « fail fast » : l’échec rapide, sans conséquences pour le business (ou plutôt aux conséquences très limitées en périmètre et dans le temps) permise par un feedback rapide (voie 2) et une vision complète du système (voie 1).La 3ème voie enseigne aussi que la pratique répétitive est un pré-requis indispensable à l’expérimentation continue: seule la maîtrise donnée par la pratique répétitive permet de mettre en place des choses nouvelles et surtout de revenir en arrière très vite en cas de problème.La mise en place de ces valeurs va permettre de mieux coller aux besoins du business et d’enfin apporter de la valeur par la vitesse, l’agilité et la pro-activité. Ce sont là les vrais mots-clefs, le reste: l’organisation du travail, la gestion des changements, la communication entre les équipes, le release management ne sont que technique pour parvenir à concrétiser ces mots-clefs, des outils pour atteindre le nirvana Devops.
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En définitive, on s’aperçoit que l’IT n’est plus un silo, une fonction « dans son coin », mais une compétence pervasive, le système nerveux du business et à ce titre un vrai avantage compétitif. Cela peut paraître comme une évidence en 2015, mais j’ai vu suffisamment de sociétés et de services IT pour vous assurer que tout le monde n’en a pas encore pris conscience. Et pour ceux qui ont cette conscience, la mise en place des bonnes pratiques, et plus encore de la bonne culture et des bonnes valeurs, a parfois allure de croisade. Si vous vous sentez concernés, la lecture de ce livre, en plus de vous faire passer un bon moment, vous mettra peut-être sur la voie.

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